Cassandre à bout portant
Prix Théophile Gauthier de l'Académie Française

Sandra Moussenpès, 'Cassandre à bout portant', publication, 2021

« Je vois au loin un ciel rose et un ciel noir en moi
Je remplace la poésie par des boissons protéinées
Ou des cerises en gélatine pour combler un déficit

Je deviens le poème que j’écris
De la glotte aux muqueuses préraphaélites
Poème cicatrice ou flacon d’eau de rose

Dans une chambre obscure avec un dessin animé
que personne ne regarde
Le poème se tient là devant toi corridor sans porte
À la verticale »

Parution : Flammarion, Coll. "Poésie", janvier 2021

À propos de l'ouvrage

Brûlé de l’intérieur, hanté d’inquiétante étrangeté et de cruauté pince-sans-rire, le nouveau livre de Sandra Moussempès ! Ne faisant qu’un avec les quatre volumes déjà publiés dans la collection Poésie/Flammarion – Vestiges de fillette (1997), Captures (2004), Photogénie des œuvres peintes (2009), Sunny girls (2015) – Cassandre à bout portant, par-delà l’exploration des dessous de la condition féminine, est d’abord une errance dérivante parmi des « objets féminins non identifiés », des miroirs, des ombres, des reliques, des présences, et des prophéties se perdant au fond de corridors sans porte. Le tout avec pour fil d’Ariane les toujours mêmes motifs obsessionnels inhérents à l’impitoyable mise à nu d’une société aliénée aux images et qui a fait du corps une idole comme du sexe une compétition. D’où la présence récurrente d’héroïnes filmiques, de filles cruelles, d’adolescentes séquestrées, de starlettes hippies ou de princesses.

Richard Blin, Le Matricule des Anges, février 2021


« C’est toute la subtilité du poème, réclamer qu’un paragraphe soit une énigme et non un faux en écriture » : ce vers extrait du dernier recueil de Sandra Moussempès, Cassandre à bout portant, dit bien l’intégrité de la poétesse pour faire vivre et transmettre la singularité de son univers inquiet. Ses poèmes, elle les envisage comme des « installations écrites », n’hésitant pas, pour les faire entendre autrement, à dévoiler l’artiste sonore et vocale qui l’habite lors de performances publiques.

Anne Ségal, Télérama, février 2021


Recueil après recueil, Sandra Moussempès s’impose indubitablement comme l’une des très grandes voix poétiques de notre contemporain. Cassandre à bout portant, qui vient de paraître chez Flammarion dans la belle collection d’Yves Di Manno, ne fait nullement exception. C’est un grand recueil poétique, sans doute le plus beau de son autrice, sans doute celui où sa réflexion, entre spectralité et plasticité, invente une évocation magistrale d’autant de figures féminines, inquiètes, séductrices, destructrices et aimantes. Entre héroïnes de cinéma et personnages de séries télévisées, les femmes poétiques de Sandra Moussempès sont aussi puissantes que les héroïnes de Cindy Sherman.

Johan Faerber, Diacritik


Dans un monde inspiré de séries et de films des « princesses filmiques » vivent des aventures imprécises. Enfermées, ou réfugiées dans une maison au fond d’une forêt, elles viennent d’autres mondes -Santa Monica, Beverly Hills-, d’autres époques et se retrouvent dans cette maison en 1972. Le récit les saisit à la manière d’une caméra, images fantomatiques, somnambuliques de « starlettes hippies »hantées par des « souvenirs dont on ne se souvient pas ». Elles arborent les signes d’une féminité offerte ou déjà victime -« nuisettes, poignets bandés » et parfois sont remplacées par d’autres (…) ».

Alain Nicolas, L’Humanité, mars 2021


Cassandre est l’un des surnoms, avec Salomé et Messaline, que le père de l’autrice choisit pour sa fille. C’est la voix de ce prénom issu du monde tragique qui tire aujourd’hui « à bout portant ». Quelles seront ses armes, ses cibles, et peut-être ses victimes ? Les hommes, les amants, les pères, les fils, les oncles, les amis, les maîtres, les lecteurs, et leurs pendants féminins ? Notre futur à tous ? Cette Cassandre, en tout cas, porte en sa voix toute une série de personnages féminins dont ce livre va narrer, en des « phrases liquides », gestes et postures, déceptions et aventures, sacrifices et agressions. C’est comme s’il s’agissait de raconter un concept féminin à partir des figures suivantes : fillettes, jeunes filles, Barbies, majorettes, revenantes, somnambules, cantatrices, actrices, poupées, princesses, sirènes, sorcières, mères, saintes, épouses, concubines, héroïnes tragiques…

Anne Malaprade, Poezibao


Après Sunny Girls (2015, Flammarion) et ses icônes en technicolor, Moussempès paraît jouer dans sa dernière création Cassandre à bout portant sur le sens littéral de l’expression « éternel féminin » en mettant en scène des jeunes femmes devenant clones, doubles, « objets féminins non identifiés » ou reflets infidèles de miroirs, toutes sortes de créatures immortelles et fantasmagoriques dans une ambiance digne des films de David Lynch. Introduites de manière organique par leurs cheveux (blonds), leurs cils (épais), leurs robes (roses), leur sang (rouge), elles sont plongées dans un décor qui se joue des clichés cinématographiques : la bourgade middle-class, la maison hantée dans la forêt, le campus, les pom-pom girls… autant de clins d’œilaux résidus fantômes, impersonnels et à la fois intimes, de nos nombreux visionnages de films ou de séries. (…)

Emilie Lassus, La Nouvelle Revue Française, mars 2021


Cassandre à bout portant se teinte d’un rose trompeur. Les motifs obsédants et fantomatiques – poupées, mannequins, paillettes – recèlent une violence sourde. Comme dans Virgin Suicides (cité dans le recueil) ou comme chez David Lynch, un univers sucré se délite, révèle une face obscure, dont le sens est flottant.

Marin Sauveur, Un journal de lecture


Errance parmi des « objets féminins non identifiés » – fringues, bout de films, miroirs, reliques, visages d’actrices, prénoms de poétesses – ce nouveau recueil de Sandra Moussempès explore les dessous de la condition féminine à l’époque du corps roi, du corps tout puissant scénarisé, sexualisé à outrance. L’auteure s’y peint aussi écrivant le poème en train de se faire et rend plusieurs hommages à ces figures tutélaires de la poésie intimistes que sont Emily Dickinson ou Sylvia Plath. Coup de cœur !

Librairie Orange Bleue, mars 2021



Cassandre a de multiples visages dans ce recueil aussi troublant qu’étonnant. Un travail de la poésie singulier qui parlera à tous, c’est une belle découverte, une poétesse majeure aujourd’hui. À découvrir absolument.

Coup de coeur Libraire Le Divan


La première de couverture, composée par l’autrice, semble suggérer des voies de lecture. « Cassandre », « la bien nommée qui annonce la perte », a pour écho « Sandra » (formé par apocope sur Alexandra, autre nom donné à Cassandre dans la mythologie) qui serait ainsi, par la poésie, quelque peu prophétesse. La couleur retenue, rose bonbon, évoque celle attribuée — autrefois ? — aux bébés filles, en accord aussi avec le buste de la femme sans visage, comme un miroir vide, dont la coiffure renvoie au dernier tiers du XIXe siècle : image de la femme sans existence propre. Le lecteur retrouvera, avec d’autres, les motifs du miroir et de l’image du double, du manque, de l’autofiction, étroitement mêlés dans un livre à la construction complexe.(…)

Tristan Hordé, Sitaudis.com


Le rose de la couverture n’est qu’une façade de même que la femme qui s’y inscrit sans visage. Mais à ce stade on ne connaît encore rien de celles dont il est question. Il y a là des tritones qui bouillonnent sous le pont de la rivière Quoi, de la rivière Qui. Les Vénus y sont de mille eaux et après avoir touché le fond de leurs piscines bétonnées par les hommes elles rejaillissent en femmes fontaines de poésie.

Jean-Paul Gavart Perret, Le salon littéraire de l’Internaute


La poésie, la musique, le cinéma surtout ici sont des armes pour raconter son histoire, c’est beau, vif, mystérieux comme toujours chez l’autrice, c’est un livre hanté comme le sont des maisons anciennes dans lesquelles il faut retourner pour un jour – osons – construire la sienne.(..)

Eric Pessan


La poésie de Sandra Moussempès danse autour des feux intérieurs et frôle l’abîme de la raison. Elle hypnotise, elle jubile. Rencontre avec Sandra Moussempès, la belle énigme, qui fait des mathématiques avec un langage syntaxique unique

Pauline Carayon, Podcast du Centre National du Livre, 2022


Au fil des pages, nous sommes happés dans un onirisme bien particulier. Les images créées sont autant de portraits non fixés. C’est un peu comme si nous nous baladions au cœur de ce qui constitue la poétesse, où les images et autres tableaux sont au sol, parfois recouvert par des draps blancs. Mais ce n’est pas un manoir où tout semble plus mort que vivant. Au contraire, la vitalité de la poésie de Sandra Moussempès réside dans le mystère qu’elle déploie.

Adrien Meignan, Un dernier livre avant la fin du monde