
Sandra Moussempès poursuit dans ce nouvel ouvrage la dissection de ses paysages intérieurs, avec plus d’apaisement sans doute que dans ses premiers livres, mais sans se départir de cet humour un peu acide qui n’appartient qu’à elle. Son univers qui oscille entre la froideur du réel et l’inquiétante étrangeté du rêve capte aussi quelque chose de la vacuité ou de la désertion moderne, dessinant de page en page le portrait d’une femme en quête de sa vérité.
Parution : Flammarion, Coll. "Poésie", septembre 2009
À propos de l'ouvrage
Sandra Moussempès fait voisiner les éléments d’un repérage narratif, des considérations générales (« l’amour de l’amour est une performance énigmatique ») et des notations de pure sensualité qui tranchent d’un trait vertical des ouvertures vers des espaces hors du texte. Le ciment de l’ensemble reste la convergence obstinée vers le questionnement sur la possibilité de la représentation, la beauté trouble de l’illusion volontaire. Ce texte qui fonctionne sur la fascination déroute son lecture pour l’accueuillir, espace de projection étrange qui a la grâce de se rendre vite familier.
Alain Nicolas, l’Humanité
Après Vestiges de fillette (1997) et Captures (2004), les sept séquences qui composent Photogénie des ombres peintes continuent à interroger les écrans trompeurs de l’apparence, l’instinct de liaison comme les pulsions de déliaison et toutes les formes de divergence et de distorsion à l’oeuvre dans le triangle que forment l’amour, la vie et le langage (…)
Richard Blin, le Matricule des Anges
La poésie de Sandra Moussempès évoque l’espace intersubjectif du philosophe japonais Bîn Kimura, une sorte de chaos par surabondance de propositions sans rapport entre elles, une architecture d’interactions et de couleurs dont la beauté perfore, frôlant, pour s’en défendre, la liquidation de l’art telle que l’envisageait Karel Teige : trace du poème qui brille encore là ou il n’y a plus d’art. Certains textes permettent à nouveau d‘y croire, on les lit on les voit, on les sent éclater en soi avec la puissance d‘un tableau de Tomory Dodge.
Philippe Rhamy, revue Hétérographe
Une des choses que l’on comprend à force de lire : les auteurs importants ne sont pas secrets. Ils sont là, ne se cachent pas, ils ne cachent rien non plus, ils disent tout, ils cherchent même parfois à nous aider à les suivre (…) Sandra Moussempès vous sidère, vous scotche sur place, vous voilà immobilisés, pieds au plafond et sans trucage (…) Depuis 1994, Sandra nous avertit. Il faudra courir et courir ne servira à rien. Sans relâche elle décrit ce monde de frôlements et d’évitements, de procédure et d’absence, de passages secrets et de tentatives d’évasion.
Chandramuki (Jean Lewinski), Cahiers critiques de Poésie
Sandra Moussempès va jusqu’à nous livrer des éléments théorisés de son écriture photogénique (pour Delluc, « La photogénie, c’est l’accord du cinéma et de la photographie ») : « concordance texte/image », « flux des ralentis », « dénuement de chaque réalité mise en scène »… Que les procédés mobilisés ressortissent au cinéma ou la photographie, qu’ils fixent mots et images ou rendent le tremblé des choses vues, ils participent d’un même art de la suggestion par contraction spatio-temporelle, condensation elliptique-tout comme le style télégraphique, les tirets, les blancs ou les pointillés-et seule compte la visée poétique : l’agencement d’affects et de percepts, la transformation intensive des matériaux sensible, l’émergence de l’image-cristal (Deleuze) dont la puissance hypnotique est maximale…
Fabrice Thumerel, Libr-critique.com
Celui-ci ne peut être résumé tant la palette d’impressions, de sentiments, de perceptions, de réflexions mise en œuvre par S. Moussempès donne lieu à des variations, des prototypes, des rythmes inventifs où se déploient subtilement et non sans élégance un lexique et une syntaxe maîtrisés (utilisation variée des interrogatives par ex.), ce qui contribue grandement au feuilletage des registres et au jeu polysémique qui caractérisent ce livre. Ecrire seulement qu’entre la dédicace au fils et la présence tutélaire du père trop vite disparu, sont évoqués les épisodes d’une histoire d’amour dont les mots sont des traces prenant place dans le réel, l’imaginaire, voire le symbolique.
Jean-Marc Baillieu, Sitaudis.com
Oscillations entre rêve, fantaisie et réalité, tonalités variées, paroles en liberté parcourent le recueil : « il ne faut pas scintiller en robe de bal / pour être normale avec un doigt sanguinolent / ni fuir le brouillard dans un profond sommeil. » Et de nous conduire dans les labyrinthes de l’esprit, mondes d’ombres évanescentes, simulacres qui s’agitent et réveillent en nous, victimes d’un sommeil atavique, les fantasmes d’un passé qui ne cesse de revenir. Les paysages intérieurs de Moussempès se superposent à une chaude et sensuelle représentation de la gravidité du réel (…)
Francesco Magris, Libr-critique
Les micro-narrations constellent d’inaccaparable, demeurent horizons à leur manière (comme regarder au fond des yeux de quelqu’un ce qui trouble la vue), fenêtres sur le temps, sériées. Chaque évocation place autant le lecteur sur une piste qu’elle l’en éloigne. Sa poésie se joue véritablement du temps et des perspectives.
Matthieu Nuss, Libr-critique.com
Ainsi l’écriture scarifiée de Sandra Moussempès tente-t-elle de capter le réel par de multiples procédés : le recours au vocabulaire technique de la photo, du cinéma, la juxtaposition cinétique d’images cocasses et de syntagmes nominaux déformés par « malentendus, les jokes et la parodie, les inversions de mots et associations d’idées ; tout un ensemble d’expressions qui détonnent, étonnent et détonent par la justesse de leur surgissement inattendu au cœur du discours.
Angèle Paoli, Terres de femmes