
Sauvons l’ennemie poursuit bien sûr cette quête intérieure – ou cette longue enquête à travers les diverses versions de soi-même qu’est l’œuvre de Sandra Moussempès. Chacune des neuf séquences qui composent l’ouvrage apporte ainsi un éclairage différent et révèle un nouveau pan de ces mondes emboités (comme des poupées-gigognes) dont l’auteure seule semble détenir la clef. Qu’elle joue avec des figures spectrales héritées de l’ère victorienne ou avec les héroïnes aseptisées des séries américaines, elle dissimule autant qu’elle nous laisse entrevoir des paysages intérieurs souvent troubles, mais dont l’humour n’est jamais absent. C’est que le poème est pour elle un moyen – plus qu’une fin – et l’éclaire elle aussi à mesure qu’elle avance : « Ma voix se justifie / Par l’écriture // Ma vie se justifie / Par l’assemblage // Cette façon de boire le thé bouillant / Sans se brûler ».
Parution : Flammarion, Coll. "Poésie", mars 2025
À propos de l'ouvrage
C’est en guerrière à la fois possédée et dépossédée que Sandra Moussempès poursuit la quête de de sa vérité, en usant de la poésie comme d’une arme aux pouvoirs redoutables (…) En des suites de séquences, de plans fixes ou de zooms sur des paysages intérieurs aussi tourmentés qu’oniriques, Sandra Moussempès, en mêlant l’hyper-subjectivisme à l’autofiction, et en se prévalant d’héroïnes filmiques ou de sœurs en écriture comme les Emily Dickinson ou Brontë-, revient sur les expériences traumatiques subies dans la sphère familiale, sociétale ou amoureuse(…) une écriture poétique qui est aventure esthétique autant qu’aventure mentale. D’où la beauté inquiétante de cette poésie qui, transcendant tout savoir, donne corps à tout ce qui d’une vie ne peut pas être mis en récit.
Richard Blin, Le Matricule des Anges
L’écriture de Sandra Moussempès est magique : elle participe d’une ontologie trouble, où les événements psychiques nourrissent le sentiment d’existence et de réalité comme le reste des éléments du monde, et vice versa. Et si son livre est magique, il est bon pour la santé. C’est un talisman, redoutablement efficace pour magiquement faire basculer l’ambiance dans un monde où les percepts et les affects sont machinés, non, musiqués, « magiqués » en un espace interne qui est externe, « espace extérieur / robe rouge de l’anarchie », un monde avec des exercices de sorties de corps, où ça rigole mais d’un rire tellement étrange, tellement atmosphérique, non-certain, à efficacité aléatoire, que soudain l’équation poème = blague = vie = mort semble limpide et évidente.
Antoine Boute, Sitaudis
Si l’univers poétique de Sandra Moussempès est depuis longtemps marqué par un imaginaire topique, la poétesse parvient toujours à en redéfinir les codes et les marges. La plasticité des figures empruntées à un univers parfois cinématographique, parfois littéraire – le roman gothique, notamment –, et parfois new wave, offre une palette exemplaire du refus de l’assignation et de l’unité (…) L’écriture de Moussempès a défini l’indéfini à soi – à elle – d’un espace de l’écriture où règnent le mystérieux et le tremblement. Le poème, chez elle, est cette manière de se tenir au seuil du château inquiétant pour mieux faire l’expérience du vacillement (…).
Rodolphe Pérez, Diacritik
Histoires de « mondes emboîtés (comme des poupées-gigognes) dont l’auteure seule semble détenir la clef ». Qui prend plaisir à se frotter aux spectres, à dialoguer avec les apparitions, en souvenir des deux Emily (Dickinson et Brontë) et du monde de David Lynch, y trouvera son compte. « La maison pleure si personne n’y pénètre. »
Christian Rosset, Diacritik
Dans Sauvons l’ennemie, l’autrice se confronte à son « miroir biographique » en un parcours qui récapitule la thématique de ses livres précédents (…) plus clairement que que dans ses livres précédents, elle évoque des épisodes douloureux de son adolescence. (…) Elle a pour compagnes « les deux Emily » mais aussi « Lilith, Dolores, Pénélope, Iphigénie » (…) Ces réflexions, qui ajoutent à l’émotion de la lecture, acquièrent alors une portée générale, énoncée en deux chapitres brefs où s’exprime l’art poétique de Sandra Moussempès : « Les poèmes brefs forment des allées d’arbres/Les poèmes longs/s’écroulent ».
Alain Nicolas, L’Humanité
La question de l’image est en effet centrale dans le livre. Actrices des années 1970, femmes de l’époque victorienne, le tout mêlé aux fantômes, si bien qu’on ne sait plus qui est réel, qui est le fantôme
Clément Alfonsi, Anath et Nosphé
Un nouveau recueil décisif, saisissant quart de tour d’une poésie souterraine toujours neuve et toujours profondément cohérente dans son chant subtil et intense (…). En une trentaine d’années et une douzaine de recueils, une quête en profondeur s’est élaborée, jouant pourtant de la légèreté et du diaphane, quête jamais achevée dont chaque étape s’offre à la fois comme une percée et comme une surprise de lumière cohérente. (…). Peut-être encore davantage que dans ses recueils précédents, Sandra Moussempès nous offre ici une poésie profondément féministe, intime et politique, une poésie soigneusement codée pour éviter les impasses de la trace directe – dont trop de ses sœurs restent friandes -, une poésie qui force le langage à détecter, incarner et traduire l’étrangeté même qui se terre au cœur des icônes les plus emblématiques d’une culture patriarcale sachant, comme le capitalisme, toujours se réinventer derrière de nouveaux masques et de nouvelles modes à consommer. Un travail au long cours, précieux et éblouissant, de justesse, d’inventivité et de passion maîtrisée, de surprise et d’humour.
Hugues Robert, Blog des coups de coeur de la librairie Charybde
« Érigeant une maison hantée, demeure intérieure de l’indistinct et d’une inquiétante étrangeté, Sandra Moussempès fait vaciller les certitudes et osciller les images dans un trouble entre le réel et son double. Le poème alors est un outil de réagencement du réel, et sauvant l’ennemie, un moyen pour en trouver une nouvelle formule, plus juste, faisant émerger une réalité nouvelle, un double. « Voudrais-tu accorder ta main à la seconde moitié de cette phrase ? »
Clément Beaulant, Collateral
« (…) Sauvons l’ennemie, signe sans doute son plus éblouissant texte. Sondant et scrutant toujours les figures féminines, les héroïnes les plus fragiles, la plus anglo-saxonne des poétesses françaises revient pour littéralement sauver l’ennemie, à savoir sauver ce que l’on peut d’un réel blessant et mortifère pour continuer à vivre. Ou plutôt survivre. Un réel saturé qu’un vers synthétise : “Une emprise fait de toi l’équerre parfaite”. Et que l’écriture aura à charge de démêler : “Ma réalité ne vous habite pas / livrée à elle-même dans son gilet pare-balles.”, le poème cherchant à cerner ce qui blesse : “la bouée entre réel et voix off devient l’armure de la parfaite survivante / au coeur plombé”.
Johan Faerber, Collateral
« Un grand livre de poésie »
Marin Sauveur, Librairie Gallimard
« Variations surréalistes des vagues à l’âme d’une poétesse originale. À la fois héroïne d’un Mulholland Drive revisité et chimère victorienne résolument féministe. Gros coup de cœur pour ces vers insolites et curieux. ♥ »
Léa, Coup de coeur Librairie Maupetit